ARTÉMIS

ArtemiV

 

 

La naissance d'Artémis

La belle nymphe Léto, née de l'union entre le Titan Coeos et la Titanide Phoébé, avait su attirer la convoitise du très volage Zeus.

Ils s'unirent donc secrètement ; mais c'était là vite oublier la jalousie maladive de la rancunière Héra !

Elle ne tarda pas à découvrir l'infidélité de son mari : Léto était enceinte ! Et elle réclamait la reconnaissance de ses futurs enfants par le Roi des Dieux.

Ce dernier feignit de ne rien savoir et retourna à d'autres occupations…et à d'autres conquêtes.

Abandonnée, Léto dut faire face seule à la folie vengeresse d'Héra : aidée de sa fille Ilithye, déesse des accouchements, la Reine des Dieux fit vivre un véritable calvaire à la malheureuse. Elle ordonna tout d'abord à toutes les terres existantes de refuser l'hospitalité à Léto. Puis elle délivra le géant  Tityos, fils monstrueux de Zeus et de la nymphe Elara, du Tartare pour qu'il poursuive de ses assiduités l'amante de Zeus. Enfin, Héra demanda à Gaïa d'enfanter un monstre destiné à tourmenter Léto ; ainsi naquit Python, un horrible et colossal serpent. Bref, aucun répit ne fut accordé à celle qui n'avait commis aucun pêché sinon de succomber aux avances du grand Zeus.

Après des mois d'errance, désespérée, exténuée, le cœur aussi gros de chagrin que son ventre ne l'était de grossesse, Léto tombe de fatigue sur une plage grecque, prête à accepter son funeste sort non sans avoir une dernière fois imploré la pitié des Dieux. Et ce fut Poséidon qui prêta attention aux pleurs de la belle et fit surgir des eaux une île flottante qu'il appela Ortygie[i]. Léto put enfin trouver refuge sur une terre nouvelle ; Poséidon fit remarquer justement à sa belle-sœur Héra que sa malédiction ne pouvait porter à un territoire qui n'existait pas au moment où le sort a été formulé. Et qui plus est, l'île n'était pas encore fixée à la terre, si bien qu'elle appartenait encore à la mer, son domaine !

-         Qu'à cela ne tienne !, répondit-elle. Je condamne la progéniture de la perfide Léto à ne pouvoir voir le jour que si elle vient au monde sur aucune terre ni aucune mer qui soit et qui sera jamais !

Voici Poséidon bien embêté…C'est alors qu'Athéna intervient, écœurée de l'acharnement de sa marâtre. Elle fait jaillir du sol de l'île un olivier et recommande à Léto de se suspendre à une de ses branches. Dans une telle posture, elle n'était ni sur terre ni sur mer !

Honteuse de son échec, Héra décide d'accorder à Ilithye la permission de porter secours à la malheureuse. Si bien qu'au bout de 9 jours et 9 nuits de douleurs, Léto donne naissance non pas à un mais à deux splendides bébés : un garçon et une fille. Ainsi naquirent Apollon et Artémis ! L'île si accueillante fut récompensée de son hospitalité : elle fit son entrée dans la liste des terres officielles sous le nom de Délos[ii] et sera désormais consacrée au culte des jumeaux divins.

 

Un caractère bien trempé

Nourrie au nectar et à l'ambroisie par la Titanide Thémis, Artémis devient en 7 jours une splendide jeune femme au caractère bien trempé. Accompagnant son frère jumeau sur l'Olympe afin de se faire reconnaître par son père, elle conquiert tout de suite la tendresse du Roi des Dieux. Ce dernier en effet, en bon papa gâteau, cède à chacune des exigences qu'elle formule : elle obtient le privilège de pouvoir rester vierge et la promesse que les autres Dieux ne cherchent à abuser d'elle, un char d'argent auquel sont attelées 5 biches sacrées[iii], un carquois, un arc et des flèches qui ne ratent jamais leur cible, des chiens de chasse, des sanctuaires dans toutes les forêts et enfin 60 Océanides pour l'accompagner lors de ses expéditions dans les bois. C'est en effet dans les forêts que la déesse aime à passer son temps, fuyant ainsi la présence des hommes.

Elle suscitera tout de même bien des convoitises : c'est ainsi que lors de la Gigantomachie les Aloades chercheront à s'attirer de force ses faveurs[iv]. Mais il était dit que ces Géants, excellents chasseurs par ailleurs, ne pouvaient périr de la main d'aucun dieu. Artémis eut alors l'idée de se métamorphoser en biche et de passer subrepticement entre les deux lourdauds qui, poussés par l'instinct de prédateur, se lancèrent leurs javelots l'un vers l'autre et moururent sur le coup, victimes de leur bêtise.

La déesse de la chasse aime à se faire justice elle-même : si les flèches de son divin frère peuvent aussi bien faire périr que guérir, les siennes apportent fatalement une mort foudroyante. Avec Tityos et Niobé, on peut citer Actéon et Orion parmi les plus fameuses victimes de son caractère ombrageux.

 

Ombrageuse et rancunière

Actéon était un beau jeune homme, fils d'Aristée et d'Autonoé, qui avait reçu l'enseignement du centaure Chiron et devint ainsi l'un des plus fins chasseurs du pays. Alors qu'il poursuivait un jour avec sa meute de 50 chiens fidèles une belle pièce de gibier dans les montagnes du Cithéron, il fut intrigué par des rires féminins émanant de derrière un bosquet. Prenant d'infimes précautions, il s'approcha du bosquet et aperçut alors le plus beau spectacle de sa jeune vie : la déesse Artémis et ses compagnes prenant leur bain dans une rivière ! Etait-ce l'émotion qui lui fit perdre son attention ? Toujours est-il qu'il commit un impair en marchant sur une branche de bois sec et que l'ombrageuse déesse, outrée d'avoir été ainsi surprise, rentra dans une fureur sans pareille : elle transforma immédiatement le malheureux en cerf et le fit ainsi dévorer par sa horde de 50 chiens[v], malgré ses supplications.

Orion, lui, est le présent accordé à un couple de paisibles paysans par Zeus, Poséidon et Hadès pour les remercier de leur hospitalité. Chasseur émérite, il tenta un jour de faire violence à Artémis. Bien mal lui en prit, puisque la déesse envoya un scorpion lui infliger une piqûre aussi mortelle que foudroyante[vi].

Parmi les autres victimes de la rancunière vierge, on peut encore évoquer le héros Agamemnon, chef des troupes grecques lors de la guerre de Troie : juste avant de lever l'ancre, il se vanta d'avoir capturé une biche si belle et si grande que même la déesse Artémis ne pouvait égaler son exploit. Pour faire payer cette effronterie, la déesse interdit aux vents de souffler, si bien que l'expédition punitive fut bloquée en rade. Le devin Calchas obtint la solution de la bouche même de la sanguinaire Artémis : elle voulait qu'on sacrifie la propre fille d'Agamemnon, Iphigénie ! On fit venir la malheureuse sous le fallacieux prétexte de la marier au bel Achille. Le courroux de la déesse ainsi apaisé, les Grecs purent partir pour Troie.

 

Entourée de mystères

Crainte et respectée de tous et toutes, Artémis développe un culte encore entouré de mystères et de contradictions pour les mythographes. Protectrice des Amazones, car elle aime à ce que les femmes prennent en main leur destin, elle revêt également pour ce peuple des attributions typiquement féminines voire maternelles : elle est ainsi la déesse "aux 100 mamelles" gonflées de lait, symbole de fertilité et de générosité[vii] à Ephèse. En Tauride, autre sanctuaire consacré à la déesse, on la représentait portant une torche à la main droite, le front surmonté d'un croissant d'argent et le visage menaçant.

Autre trait particulier : son goût pour la solitude et la nuit, son totem lunaire et le secret qui l'entoure ont donné un caractère mystique à Artémis. D'aucuns sont allés jusqu'à l'assimiler à la terrible Hécate, jalouse gardienne des secrets de la magie noire et des mystères de la nature, crainte par tous les Grecs. Si bien qu'Artémis se voit également attribuée parfois du titre de déesse de la magie.

 

Petite fiche récapitulative

Nom : Artémis

Signification : source d'eau fraîche

Père : Zeus

Mère : Léto

Sanctuaire privilégié : Ephèse …et les forêts en général

Attributions : lumière lunaire, chasse, magie

Symboles : croissant lunaire, arc + flèches

Animaux consacrés : lièvres, cerfs, biches

 

Les attributions de la déesse Artémis

 

Attribution

Retranscription

Traduction

Agroterh
Diktunnaia

Dafnaih
KedreatiV
Karuai

Elafiaia
Lukeih
Aiginaih

Limnaih
LimnatiV
Eurunwmh

PaidotrofoV
Patrwia
SelasforoV
FwsforoV

Swteira
'Hmerasia

'Hgemonh
'Umnih

Propulaih
Agoraia

Apankomenh
Lugodesmh
'Eurippa
Peiqw
Purwnia

Aristh
Eukleia
Kallisth

'Iereia
Prwtoqronih

ElafeboloV

LagoboloV

Agrotérê

Dictynnaïa

Daphnaïe

Cedréatis

Caryaï

Elaphiaïa

Lycéié

Eginaïe

Limnaïe

Limnatis

Eurynome

Pédotrophos

Patroïa

Sélasphoros

Phosphoros

Sutéira

Hémérasia

Hégémone

Hymnié

Propylaïe

Agoraïa

Apancomène

Lygodèsme

Eurippa

Péitô

Pyronia

Aristê

Eucléia

Callisto

Hiéréia

Protothroniê

Elaphébolos

Lagobolos

La chasseresse

Qui pose des pièges

Du laurier

Celle du cèdre

Celle du noisetier

Celle des biches

Celle des loups

Celle des chèvres

Celle des marais

Celle des marais

Celle des grands champs

La nourrice

Qui aime le père

Qui apporte la lumière

Qui apporte la lumière

La sauveuse

Qui soulage

La meneuse

Qui chante des hymnes

Celle du pont

Celle de la place

L'étrangleuse

Celle du peuplier

La cavalière

La persuasive

L'enflammée

La bête sauvage

De bonne réputation

La magnifique

La prêtresse

Qui siège sur le premier trône

La tueuse de cerfs

La tueuse de lièvres

 

 



[i]  Ce nom provient d'un mot grec désignant la caille.

[ii]  Ce nom provient du grec signifiant éclatante.

[iii] La principale biche, Hercinia (ou Arcadia selon les versions), n'est autre que la fameuse biche aux pieds d'airain et aux cornes d'or dont la capture constituera l'un des 12 Travaux d'Héraclès.

[iv] Ainsi que celles d'Héra.

[v] Ce nombre 50 pourrait correspondre au nombre de jours durant lesquels la végétation cesse totalement de vivre.

[vi] Et c'est depuis que les constellations d'Orion et du Scorpion sont exactement aux antipodes l'une de l'autre sur la voûte céleste.

[vii] C'est d'ailleurs ainsi qu'elle était représentée dans son sanctuaire d'Ephèse (Turquie), dont le temple constituait l'une des 7 Merveilles du Monde.